![[INTERVIEW] Stéphan Tartari, manager général des Boxers de Bordeaux dévoile les dessous du mercato](/uploads/images/stephan-tartari-nous-raconte-les-dessous-du-mercato-68358b71aa671602065722.jpg)
[INTERVIEW] Stéphan Tartari, manager général des Boxers de Bordeaux dévoile les dessous du mercato
Catégorie : hockey-sur-glace
Equipes associées : Les Boxers - Bordeaux
Mis à jour le : 27/05/2025 09:56
[Question] Bonjour Stéphan, comment ça va en ce mois de mai ?
Le mois de mai, beaucoup de boulot, avec la construction de l’équipe avec aussi les renouvellements de nos partenaires et la stratégie pour l’année prochaine des abonnements, la com, donc c’est très chargé depuis la fin de saison !
Je me doute, ici les soirs de match on va dire que 90% de la patinoire te connais, aux Boxers tu as été joueur, joueur entraineur, entraineur puis enfin manager général en 2012, est-ce que tu peux décrire ce qu’est réellement ce rôle ?
C’est un rôle qui a beaucoup évolué, où il y a une dizaine d’années on était deux avec Pascal Lemaitre où on faisait comme on pouvait à l’époque bien sûr. L’époque s’est structurée avec l’arrivée de Thierry Parienty à la tête du club où petit à petit le budget du club a augmenté et où on a recruté à différents niveaux pour se professionnaliser. Ça nous a permis de grandir aussi à tous les niveaux : que ce soit l’équipe, les partenaires, l’accueil, les animations matchs, les salons VIP. Donc aujourd’hui je suis un petit peu partout mais surtout sur le sportif au quotidien. Mais il y a beaucoup de sujets, notamment la boutique qui va arriver, on va pouvoir l’installer d’ici une semaine. Ça montre aussi l’évolution du club. Donc ce sont des journées bien remplies : les appartements pour les joueurs, la gestion avec Pascale Lemaitre, la gestion des partenaires, la com sportive avec Claude Canellas, le merch pour la boutique... donc c’est vraiment complet et intéressant d’avoir un œil sur tous les sujets. Et puis surtout la négociation de contrat, la recherche de nouveaux joueurs, le départ de certains… donc ça c’est la grosse partie de l’été !
Comment est-ce qu’on gère lors de la période des transferts sur le plan humain et stratégique ?
Sur le plan humain faut pas se cacher c’est difficile, j’ai pris de l’expérience aussi au fil des années et il est important de mettre l’affectif de côté. On est là pour le club pour faire le mieux pour l’équipe que ce soit au niveau de l’attitude, de l’engagement sur la glace, des performances, tout ça est très important. Donc on met ça de côté, tout comme le staff sportif, et on essaye de construire la meilleure équipe sportive avec des rôles bien définis pour que les joueurs soient aussi satisfaits. On leur vend pas du rêve : « ah non tu vas jouer 30 mins par match, jouer les powerplays »… voilà il y a des rôles précis, il faut qu’ils les acceptent et s’ils acceptent c’est parti, on va à la guerre ensemble pour gagner le maximum de matchs et être champion !
La saison passée, l’effectif n’a presque pas bougé, à ce jour on a eu la confirmation de certains départs et arrivées prometteuses, est-ce qu’on peut parler d’un nouveau cycle pour les Boxers ?
Alors, c’est un gros mot un nouveau cycle ! Parfois c’est un nouveau cycle pour certains joueurs, il y a une histoire qui se finit. Des fois c’est nous qui choisissons, des fois c’est le joueur aussi qui a besoin d’un nouveau challenge, de voir autre chose. Donc cette année il y a plus de départs de prévus, ce n’est pas une mauvaise chose. On garde un socle solide, il y a certains gars qu’on voulait que ça change, d’autres joueurs qui ont voulu bouger et qui ont eu de supers offres venant d’autres clubs où ce n’est pas possible pour nous de suivre, ou alors nous n’avons pas choisi de suivre aussi. C’est assez complexe mais c’est le lot de chaque été et c’est aussi excitant de pouvoir travailler, négocier avec les joueurs, se battre avec d’autres clubs pour signer untel ou untel. Des fois c’est une bonne nouvelle, des fois une mauvaise mais ça fait partie du jeu. Et puis des fois il y a un joueur qu’on drague depuis trois ans et on pourra l’avoir que cette année !
On a vu la confirmation de Quentin Papillon, sous condition jusqu’à mi-juin s’il n’a pas une « belle offre » d’un club étranger, c’est quoi qu’on pourrait considérer comme une offre alléchante et surtout est-ce que ce n’est pas un peu risqué de confirmer ce joueur même s’il peut partir à tout moment et qu’il faudra donc trouver un joueur pour le remplacer ?
C’est ce que j’expliquais avant et c’est vrai que beaucoup de gens ne comprennent pas ce volet-là de pouvoir laisser partir un joueur. Je veux dire, nous aussi en France on est un peu des tremplins pour les joueurs (français comme étrangers mais surtout français). D’autres clubs l’ont déjà fait, chaque année dans différents clubs ça se fait. Mais nous on a décidé de le communiquer pour être honnête avec nos partenaires et supporters. D’autres clubs ne le font pas mais nous souhaitons être transparents. Avec Quentin ça a été une belle négociation pour qu’il reste à Bordeaux. Voilà, s’il a une super opportunité pour lui que ce soit salariale ou de développement de carrière pour pouvoir « stepper », on sera supers contents pour lui. C’est qu’on aura aussi fait notre travail avec lui à Bordeaux, c’est qu’il aura pu montrer tout son talent et aura été aussi repéré et bon en équipe de France. C’est bon pour la fédération comme pour notre ligue. C’est sûr que c’est risqué, mais s’il part on sera super contents pour lui et aussi déçus car c’est le meilleur gardien de la saison de Ligue Magnus. Donc il était évident qu’on allait tout faire pour le garder. Il a été très sollicité en France, ce qui est normal, donc on est déjà très fiers qu’il ait accepté de continuer avec nous. S’il part on ira chercher un gardien étranger, on a déjà fait notre recrutement en conséquence de savoir s’il part, on peut aller chercher un étranger.
On sait que Grenoble, Angers et Rouen sont le top 3 en termes de masse salariale (et Marseille arrive très fort), Bordeaux c’est plutôt entre top 4 à 6, comment on fait pour lutter en période de transfert contre ces clubs qui ont un budget plus conséquent ?
À un moment donné, chaque club doit signer ses 10 Français, donc la première bataille c’est sur les Français. Donc ça dépend des rôles qu’ils auront, les joueurs français veulent gagner et aller dans un club qui espère gagner, mais à un moment donné y’a pas la place pour tout le monde ! Donc il faut déjà convaincre le joueur avec notre projet, son temps de jeu, ses responsabilités, et le travail avec le coach en hors glace aussi c’est important. C’est une négo très complète, on peut rajouter le fait d’être bien logé, bien accueilli, que ceux qui viennent avec leur femme aussi que la conjointe se sente bien.
Oui le cadre de la ville doit jouer énormément aussi je présume ?
Oui, oui, alors ça faisait plus la différence avant, maintenant c’est à prendre en compte aussi avec le salaire, c’est leur métier donc c’est normal, c’est de grosses négos, le marché monte donc on arrive de plus en plus à se positionner contre les tops 3 on va dire. Et c’est vrai que la signature de Quentin Tomasino en est la preuve et on voit que d’autres clubs du top 3 viennent chercher des joueurs chez nous donc ça veut dire qu’on progresse !
L’objectif on se doute c’est un titre (que ce soit Magnus ou Coupe de France), est-ce qu’il y a un autre objectif qui est de définitivement s’installer dans le top 4 ?
Ah oui ça fait partie des objectifs ! L’objectif numéro 1 c’est de chercher un titre parce qu’on est ambitieux et on le sait, mais à un moment donné on a montré qu’on pouvait faire des choses. Mais on est surtout lucides, on se prend pas pour d’autres, on reste à notre place, on sait très bien ce qu’ont les autres pour aller chercher des joueurs qu’on aimerait bien. Un joueur peut-être signé… mais en tout cas on est très contents de ce qu’on est en train de faire en ce moment. Tout n’est pas annoncé mais c’est travaillé, il y a des mauvaises nouvelles, des bonnes nouvelles, mais au final y’aura 22-23 joueurs comme l’année dernière, les partants seront remplacés. Voilà, après on verra en fin de saison prochaine si l’équipe est meilleure ou pas. En tout cas les autres équipes se renforcent, le championnat monte, donc c’est une bonne chose pour le championnat de France, pour nos internationaux français car leur niveau va monter aussi. Ça permettra aussi peut-être de garder certains joueurs qui voulaient partir comme Quentin (Papillon) et d’attirer aussi de meilleurs joueurs étrangers donc ça c’est une bonne chose.
J’en dis pas plus, on aura normalement une super annonce dans quelques temps (NDLR : il s’agit de la signature de Jakub Kindl, ancien joueur NHL et AHL qui a signé aux Boxers pour la saison 2025-2026).
Est-ce que si ce top 4 n’est pas réalisé la saison prochaine on pourra parler d’un échec ?
Alors on est ambitieux, on veut être dans le top 4 mais ce qui compte c’est les playoffs. Le top 4 c’est important pour les quarts de finales pour pouvoir avoir l’avantage du terrain si jamais il y a un septième match. On peut très bien finir cinquième, sixième et aller au bout, c’est sûr qu’on ne se facilite pas la tâche. Le top 2 est encore plus important en soi mais il y a des scénarios où en finissant cinquième tu peux aussi avoir l’avantage de la glace même si c’est très rare. L’objectif de la saison régulière c’est effectivement la meilleure position possible mais c’est très prêt pour les playoffs et performants pendant les playoffs.
Cette saison on a vu beaucoup de nouveautés hors glace (camp d’entraînement au Québec, nouvelle entrée des joueurs, nouveaux écrans sur les coursives, nouveau bus pour les joueurs) est-ce que pour la saison prochaine des nouveautés sont déjà prévues ?
Déjà c’est de continuer ces choses-là qui fonctionnent très bien, amener des petites nouveautés. La bodega devrait évoluer car elle fonctionne de plus en plus et est même surchargée à la fin des matchs donc un endroit plus grand pour plus de monde avec des échanges avec les partenaires, nos supporters, joueurs et staff, donc des moments importants. Ça contribue beaucoup à l’évolution du club et à la bonne ambiance qui y règne ! Donc ça c’est acté. La boutique qui va enfin ouvrir, ça a pris le temps mais une bonne chose. Et d’autres nouveautés qui vont arriver mais ça… je ne peux pas trop en parler encore.
Tu parlais d’élargir la bodega, je vais parler du public, les matchs à guichets fermés se sont enchaînés à Mériadeck, il ne va pas falloir pousser les murs au bout d’un moment ?
Alors on a la chance d’avoir une super patinoire très bien placée. Déjà faire 3500 personnes – même si à certains matchs on pourrait faire 4000, 5000 –, le plus important c’est de le tenir sur l’année. On voit l’UBB qui devient peut-être trop petit et ira plus au Matmut sûrement, mais c’est déjà bien. On a un très bel outil, les gens adorent venir à Mériadeck, on voit bien de partout, beaucoup de salles VIP pour les partenaires, l’ambiance est top, deux clubs de supporters (L’esprit Boxers et le Block Boxers) qui font monter l’ambiance des deux côtés. C’est de plus en plus fort et important pour les joueurs. C’est déjà bien, on va pas faire les difficiles, on a déjà une des plus belles patinoires de France !
Tu parlais des deux groupes de supporters, ça fait vraiment la différence en période de playoffs, ça se voit que le niveau monte d’un cran aussi pendant ces matchs du côté public.
Oui je pense que le public a vraiment compris ce que c’étaient les playoffs il y a deux ans avec la série contre Marseille puis Grenoble puis la finale. C’est vrai que c’est assez nouveau pour le public français qui ne connaît pas trop la NHL ou même la NBA. Et on le sent que dans le public avec les supporters, tout le monde se met en mode stressant, intense, détester l’adversaire mais dans le bon sens avec respect, une niaque, hargne, une électricité même dans la patinoire et c’est top ! Le public a compris ce que c’était et répond présent. Avant on avait du mal à remplir les quarts de finale, maintenant qu’on est ambitieux c’est vraiment un moment incroyable.
Tu disais que la ligue est en train de s’endurcir, est-ce qu’à part Bordeaux tu vois un autre outsider à surveiller ?
Y’a Amiens qui est là, Nice et Gap. Faudra aussi surveiller les équipes qui comme Briançon a fait une fin de saison incroyable avec 10 victoires sur 12 matchs donc s’ils ont un rythme comme ça en saison régulière attention tout de même. Gap a eu une saison difficile mais attention à eux. Marseille va vraiment être là car je pense qu’ils vont dépasser notre masse salariale (le plus important), Nice a du renouveau, des actionnaires canadiens, c’est que du mieux. C’est bon pour le public, la ligue et les joueurs !
Merci Stéphan, l’interview touche à sa fin, on te laisse le mot de la fin !
Ça fait trente ans que j’œuvre au club et voir la patinoire pleine c’est toujours un plaisir. Que ce soit les bénévoles, les supporters ou partenaires, de les voir repartir avec le sourire – même si quelquefois ils ne repartent pas toujours heureux – mais avoir cette patinoire qui vibre c’est le plus beau des cadeaux. Et puis je veux leur ramener un titre, c’est mon rêve le plus profond !
A.R